Pauline Simons a produit une oeuvre ambitieuse avec HYam. Elle rejoint une lignée de mécènes très actifs sur l'île grecque.

« Hydra for Artists of the Mediterranean », est un projet philanthropique dont Pauline Simons est à l'origine, afin d'accompagner les jeunes artistes de ces pays bordés par une mer unique mais aux contextes géopolitiques différents. Mariée à un peintre grec, elle veut les promouvoir sur la scène internationale, dont ils sont souvent éloignés. En 2014, cette ex-journaliste spécialisée dans l'art crée l'association HYam et, avec le soutien de la Fondation Lagardère, un prix biennal, dont la première édition s'intéresse à la Grèce et à Chypre. Une vingtaine de créateurs sont sélectionnés, et la grecque Maria Tsagkari est choisie par un jury international présidé par Alain Seban, alors à la tête du Centre Pompidou.

La maison de ventes Artcurial, séduite par le projet, prête alors son somptueux hôtel Dassault en bas des Champs-Elysées pour accueillir une exposition consacrée aux finalistes. Et la lauréate, elle, a l'opportunité de créer une installation très ambitieuse, « The Blue as The New Green », réalisée in situ à Hydra, une île face au Péloponnèse très fréquentée par des touristes internationaux l'été.
Un QG pour les artistes contemporains l'été

Sur cette perle du golfe Saronique, depuis juillet dernier, d'étranges fleurs bleues ont ainsi envahi les rochers, symboles d'utopie, de désir de transformer le monde. Cet étonnant jardin composé de centaines de fleurs a été produit par HYam et réalisé en collaboration avec les artisans locaux.

Une sorte de prolongement au roman inachevé de Novalis, « Heinrich von Ofterdingen » : le philosophe allemand avait construit un mythe médiéval autour d'un jeune troubadour ayant tout abandonné pour la quête d'une petite fleur bleue qui hantait ses rêves et représentait pour lui les valeurs de la vie idéale et de la poésie pure.

Si Hydra enchanta Henry Miller en 1939 ou Leonard Cohen en 1960, c'est grâce aux mécènes qu'elle est devenue une référence pour l'art contemporain international. Pauline Simons suit la voie tracée par exemple par Dakis Joannou, un industriel et collectionneur philanthrope, président de la Deste Foundation. Dans un ancien abattoir, Slaughterhouse, il invite chaque été depuis 2008 un artiste à réaliser une oeuvre in situ. Cette année l'italien Roberto Cuoghi a imaginé une invasion de crabes en céramique.

De même Dimitris Daskalopoulos, un autre homme d'affaires collectionneur, à la tête d'un conglomérat agroalimentaire, et président de la NEON Foundation, soutient depuis dix ans Hydra School Project : une exposition organisée cette fois dans un ancien lycée, réunit des artistes installés et émergents, grecs et internationaux aussi connus que Damien Hirst.

Enfin le patron des cosmétiques de luxe suisses Valmont, qui lui aussi a créé sa fondation, organise pour la seconde année, une exposition au musée des Archives Historiques d'Hydra. Didier Guillon revendique de ne pas montrer les têtes d'affiche habituelles comme Murakami, Urs Fisher, Damien Hirst ou Jeff Koons, mais d'inviter le public à découvrir de nouveaux talents.

Pour la directrice du musée, Dina Adamopoulou, c'est l'opportunité de bénéficier d'une exposition clefs en main d'artistes européens, à proposer à ses 25.000 visiteurs, en ces temps difficiles pour l'économie du pays.

Tandis que Maria Kladaki, présidente de l'association des hôteliers d'Hydra, estime pour sa part que toutes ces initiatives de mécènes font de l'île une réelle destination pour les amateurs d'art, qu'ils soient simples touristes ou riches vacanciers accostant de leurs yachts pour ce parcours arty. En 2011, le « New York Times » n'affirmait-il pas qu'Hydra était désormais un passage obligatoire l'été après la Foire Art Basel en juin ? L'initiative de Pauline Simons apporte une nouvelle pierre à cet édifice.
Martine Robert, Les Echos